Archive pour septembre, 2009

La valse des prénoms

20 septembre, 2009

Louise est dans la mouise

Tandis que Raymonde se fout du monde.

Gaëlle court comme une gazelle et se ramasse une gamelle.

Mireille sommeille puis tend l’oreille.

Hilaire est hilare.

Théophile file un coup de fil.

Roberte et Berthe sont vertes.

Géraldine boit de la grenadine.

Estelle est-elle telle qu’une belle ?

Henriette mange des rillettes et fait risette.

Margot parle l’argot.

Un entretien d’évaluation particulier

19 septembre, 2009

-          Et si l’on parlait un peu de vos objectifs annuels ?

Nous sommes assis face à face autour d’une table ronde dans son bureau du troisième étage. C’est la première fois que je lui parle de mon sixième sens. Mais Georges Perrier ne comprend rien. Il doit conduire mon entretien d’évaluation annuel, c’est le seul évènement qui lui importe.

Je suis en train de lui expliquer que je suis doté de pouvoirs étranges, extrasensoriels qui devraient être beaucoup mieux exploités dans l’entreprise et lui, il me parle de mes objectifs annuels ! Par exemple, je suis capable dans une réunion de travail de rédiger son compte-rendu avant qu’elle ne se soit tenue tant ce que chacun va dire est une évidence pour moi. Perrier me regarde benoitement : il hésite entre l’envie de rire et la tentation de me virer qui le démange.

Perrier est un bon vivant, son ventre pansu débordant largement de ses ceintures de pantalon atteste de ses habitudes alimentaires plantureuses. Il promène un regard bleu électrique sur le monde dans un visage bouffi surmonté de cheveux gris peignés en brosse. En m’écoutant, ses joues rosies ont légèrement pali. Il a commencé par trouver mon discours intéressant mais comme j’insistai sur mes capacités de divination, il a voulu faire de l’humour en me demandant ce qu’il allait, selon mes visions, écrire dans mon dossier d’évaluation

La discussion se poursuit, un peu surréaliste, mais la loi est avec moi : j’ai le droit de m’exprimer lors de cet entretien. Je rappelle à Pérrier que je suis le seul à avoir deviner, à l’issue de la dernière réunion avec les japonais, que nos clients nippons allait nous lâcher en dépit ou à cause de leurs courbettes polies et leurs sourires sirupeux. Il m’avait alors vertement tancé et même  accusé de défaitisme commercial, problème que nous aurions, selon ses dires, à réexaminer lors de mon évaluation professionnelle. Précisément celle qui se tient en ce bel après-midi d’automne. Or, ce matin même, Perrier a reçu un mail charmant de nos ex-partenaires japonais nous prévenant que nous pouvions faire le deuil du contrat  mirobolant que nous avions envisagé.

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Tour de France – Nouvelles étapes

18 septembre, 2009

Il s’anima à Nîmes.

A Lunel, il se trouva dans la lune.

A Privas, il se priva.

Il tourna à Tournon.

Puis fit un tour à Tours, avant de bafouer la loi à Blois.

A Cognac, il eut la gnaque.

Il but du lait chaud à Cholet, mais cala à Calais.

Il fit des siennes à Valenciennes.

Mais il retrouva le cap à Gap.

A Mulhouse, il eut le blues.

Et fit la manche à Arromanches

Volatiles

17 septembre, 2009

Jean et Jeannette s’aimaient comme deux tourtereaux.

La cigogne est passée, apportant l’enfant.

Pendant que Jeannette bavardait comme une pie,

Jean posa son regard d’aigle sur le berceau.

L’enfant gazouillait comme un moineau.

Jean n’était pas le dernier perdreau de l’année.

Il savait que des vautours rodaient.

En entendant le merle moqueur, il s’inquiéta.

L’enfant le rassura en lui adressant un « coucou ».

Jean trouva qu’il avait une chouette famille.

Il pourra retourner à sa distraction favorite, avec Martin, le pêcheur.

 

Les malheurs de Martin

16 septembre, 2009

Martin n’avait pu fermer l’œil.

Il maugréa.

La porte d’entrée avait grincé toute la nuit sous les bourrasques du vent nocturne.

Le robinet du lavabo avait goutté imperturbablement.

Il ronchonna.

L’aspirateur s’était mis en marche.

En se levant il avait constaté que l’ampoule de sa lampe de chevet était grillée.

Il jura fortement.

La chasse d’eau perdait.

La télévision ne marchait plus.

Il grommela.

Le lustre du salon s’effondra.

Il tenta d’ouvrir les volets qui coincèrent ses doigts.

Il avait oublié d’acheter du café.

Alors, il hurla de souffrance.

Les mauvais comptes de Marcel

15 septembre, 2009

Après avoir fait le total du produit de ses larcins,

Marcel entreprit de faire un petit somme.

Pour vivre, il ne croyait pas à la multiplication miraculeuse des petits pains.

Il ne changerait pas une virgule à sa conduite.

Pendant l’armée, il n’aimait pas faire son lit au carré, il fut chassé de son unité.

En couple, il se soustrayait systématiquement aux tâches du ménage.

Au bureau, il additionnait les absences injustifiées.

Ses rapports étaient ni faits ni à faire.

Ses calculs étaient faux.

Malgré la division de sa famille, son frère n’était pas en reste.

Marcel comptait sur lui pour  d’autres opérations.

Les expériences de Clara

14 septembre, 2009

Clara regarde le profil de Maurice, allongé à ses cotés dans le lit. Son ventre pansu se soulève régulièrement au rythme de ses ronflements. Sa lippe tremblote à chaque expiration. Puis le regard de Clara fait le tour de la chambre. La tapisserie, d’un vert passé, est déchirée par endroits. Le portrait sépia d’un ancêtre inconnu domine le couple de sa moustache séculaire dans un encadré ovale. La masse imperturbable de l’armoire normande s’impose sur le mur opposé. Clara a l’impression que les ravages du temps ont atteint son équilibre. Le meuble boîte. Son miroir ébréché est bancal. 

Son premier mariage s’était déroulé comme dans un rêve. Martial venait d’être élu. C’était un jeune député plein d’idées. Avec fougue, il avait décrit à Clara son combat contre l’injustice sociale, son abnégation à lutter contre la misère, sa foi dans la capacité de la mondialisation à sauver la planète de la catastrophe écologique. Après leur union, il l’avait emmenée aux Etats-Unis dans un voyage étourdissant. Ils avaient sillonné l’Amérique de long en large et en travers. Les plages de Floride, les vallées du Colorado, les buildings de New-York, les rues pentues de San Fransico, Clara en avait pris plein les mirettes dans un tourbillon permanent. De plus, la réputation de Martial avait déjà franchi l’Atlantique : il était reçu partout avec déférence par les politiciens locaux. Les soirées luxueuses dans des palais dorés succédaient aux déjeuners protocolaires dans les restaurants les plus raffinés. Dans un anglais impeccable, Martial entretenait déjà auprès des autorités l’image d’une stature politique de niveau international. Parfois, une limousine d’une longueur interminable était mise à la disposition du jeune couple qui pouvait visiter ainsi la ville, entouré d’une escorte de jeunes gardes du corps aux épaules impressionnantes.  

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Esprits sains

13 septembre, 2009

Romain sort  du séminaire organisé par son employeur.

Ce fut une grande messe réunissant tous les cadres.

Le patron les a durement sermonnés.

Il  les a priés de se montrer plus actifs.

Selon lui, ils doivent tous communier dans un même esprit d’entreprise !

Ils doivent avoir le culte du résultat !

Ils doivent se comporter comme de véritables missionnaires !

Ils sont sensés se rappeler que le client est sacré sinon ils se retrouveront tous à genoux !

Lorsqu’ils ont un doute, il faut qu’ils relisent les instructions de la direction : c’est leur bible !

Et puis, s’il y en a qui n’ont plus la vocation, ils doivent partir !

Ma rue

12 septembre, 2009

Il y a quinze ans, des gens vivaient dans ma rue.

Il y avait d’abord Monsieur Mathurin qui descendait chaque matin Hercule, son petit chihuahua. Monsieur Mathurin était un retraité du Ministère qui avait toujours l’air distingué avec ses cheveux d’argent ondulés, soigneusement peignés vers l’arrière. Monsieur Mathurin s’arrêtait toujours pour converser ave Ibrahim, le cantonnier sénégalais car Monsieur Mathurin pensait qu’il fallait maintenir un contact chaleureux avec le peuple pour ne pas se déconnecter de la vraie vie. Les politiciens avait perdu de vue cette réalité, c’était pour ça qu’on était aussi mal gouverné.

Ibrahim portait toujours un magnifique gilet jaune fluorescent sur ses pauvres haillons. Il était ainsi visible de loin, surtout par les automobilistes imprudents qui auraient très bien pu le bousculer pendant qu’il nettoyait le caniveau.

Ibrahim aimait à discuter avec les uns et les autres. L’automne, après avoir balayé les feuilles mortes et les avoir réunies en tas que les enfants éparpillaient joyeusement à grands coups de pieds insouciants, Ibrahim s’appuyait sur son balai et s’entretenait avec Marcel devant la terrasse de son bar. Marcel, manches de chemise retroussées sur ses avant-bras velus, se disputait fréquemment avec le cantonnier à propos des résultats du championnat de foot du week-end précédent. Puis, il prenait Ibrahim par l’épaule et les deux hommes entraient au Bar des Amis pour l’anisette du matin.

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Les outils de Jérémy

11 septembre, 2009

Jérémy est sorti en vélo.

Sa passion pour le cyclisme tourne au vice.

Pris en tenaille entre une camionnette et le trottoir, il s’est ramassé une pelle.

Sur son lit d’hôpital, il a l’impression que sa tête est enserrée dans un étau.

Il pense devenir complètement marteau !

A Martha, venue le voir, il dit : « Mauvaise pioche, aujourd’hui ! »

Il en pince pour Martha depuis longtemps.

Sa beauté et son élégance le scient littéralement.

Elle s’assied à ses cotés et se lime les ongles.

Enfin il prend ses doigts fins dans ses mains de bricoleur.

 

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