Un moment d’hésitation
3 septembre, 2009Il allait monter dans le train Orient Express Venise lorsque Luigi hésita. Bertille était déjà installée dans le compartiment réservé au jeune couple. Il fallait la rejoindre rapidement. Ce mariage avait été arrangé par son père. Luigi avait été convoqué un soir d’automne dans le bureau paternel pour entendre les mesures qu’avait prises le vieil Emilio pour sceller son destin. On ne résistait pas au vieil Emilio puisque le roi de la casserole avait résisté à tout : mai 68, l’arrivée des chinois sur le marché, la crise. L’immigré italien régnait sur les ustensiles ménagers depuis plusieurs décennies sans l’ombre d’une anicroche économique : un expansion régulière, des bénéfices permanents, des actionnaires heureux, aucun licenciement de salariés, mais une main de fer.
A l’aube de ses quatre vingt cinq ans, l’aristocrate sentant probablement sa fin prochaine avait été saisi d’une nouvelle ambition. Laisser sa marque dans les esprits. Et pour parler à son prochain, il fallait s’approprier les médias. De cette réflexion était née l’idée d’unir Luigi et Bertille, la fille d’Aymar Di Salvio. La famille Di Salvio présentait le double avantage d’être d’ascendance napolitaine et d’être propriétaire d’un des plus grands groupes de presse du pays. Bien entendu, Emilio n’avait aucune intention de se préoccuper de l’avis et encore moins du sentiment des deux futurs époux.