Séminaire d’entreprise

C’est la nuit ! Minuit et quart exactement. Dans ma chambre, je tourne en rond et ne peux dormir. A dix mètres d’ici, elle est peut-être en train de travailler ou de téléphoner à sa mère ou de chercher le sommeil aussi.

Le premier jour du séminaire que la direction a organisé dans cet hôtel de luxe. Florence était assise en face de moi. En entrant dans la salle de réunion, il y avait eu une lutte sournoise entre plusieurs cadres pour siéger à coté d’elle. Finalement, ce renard de Mercadier, dans un sprint éperdu avait remporté la palme : il était à sa gauche. A trente ans, elle est superbe, Florence. Sa silhouette impeccable est soulignée par ses longs cheveux doux et dorés. Son regard noir respire, si j’ose dire, l’intelligence et la maturité.

Mercadier n’a pas perdu de temps : dès le début de la réunion, il a commencé à l’amuser. Je voyais son visage d’ange tourné vers l’intrus, son sourire s’ouvrant délicieusement sur des dents éclatantes.

J’étais mal placé : je résolus de m’intéresser au discours de notre directeur général. Sous ses airs de play-boy, Duchemin est habile. Il a des costumes faits sur mesure, les chemises aussi probablement. Par comparaison, ses cadres ont tous l’air endimanchés. A quarante-cinq ans, il soigne sa silhouette tous les matins. Il arrive au bureau à dix heures après une heure d’exercices physiques. Son visage de jeune homme, ses yeux verts et dorés, sa facilité d’élocution et accessoirement ses revenus, tout en lui plait aux femmes.

En guise d’introduction, son discours se voulut apaisant, il y mit la touche d’humour convenable :

-« Rassurez-vous, il n’y aura pas de saut à l’élastique… »

 Dans ce genre de séminaire, il y a plusieurs écoles possibles. Certains s’imaginent menacés et feront tout ce qu’il faut pour sauvegarder leur place, en ne manquant pas d’approuver chaleureusement ce que dit Duchemin. Et puis, il y a ceux qui jouent les esprits forts comme Poulain, du service informatique. Il a la bonté d’avertir son monde, Poulain :

-« Je vais peut-être dire quelque chose qui dérange… »

En fait, il ne dit rien qui dérange, mais il espère se faire remarquer par Duchemin par son esprit d’indépendance. Le gros de la troupe ne dira rien ou alors tiendra les discours les plus neutres possible. C’est par moment un vrai concours de platitude.

Pour ce premier soir, tous les cadres ont été priés de se réunir à la piscine de l’établissement. Le symbole était clair : nous sommes tous dans le même bain. Nous étions tous là en maillot de bain, un verre à la main, essayant de participer au brouhaha des conversations quand Florence est arrivée. Lorsqu’elle a laissé tomber son peignoir pour découvrir un corps parfait dans son minuscule bikini rose, les conversations ont subitement cessé. Tous les hommes présents ont eu besoin de reprendre leur souffle.

Elle a plongé directement dans la piscine. Elle avait l’air d’adorer l’eau. Immédiatement, plusieurs chefs de service ont eu l’envie de prendre un bain aussi et l’ont suivi.

Après le repas, les chambres ont été attribuées. C’est ainsi que j’ai eu la chance que la mienne se trouve en face de la sienne. Il faut que je tente le tout pour le tout : maintenant ou jamais ! Je prends un dossier, je vais frapper à sa porte sous prétexte de lui demander une précision sur une affaire que nous avons traitée ensemble.

Mince ! La minuterie ne marche pas dans le couloir. Noir complet. Je dois sortir mon briquet et avancer à tâtons pour ne pas me tromper de porte.

La lumière revient d’un coup. Je cligne des yeux sous sa violence. Le spectacle me coupe le souffle : devant moi, se tiennent deux hommes, Duchemin et Mercadier, un briquet à la main, un dossier sous le bras.

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