Un manteau rouge dans les bois
27 février, 2009Brigitte a préparé le panier de victuailles comme chaque semaine. Sa mère Marie, qui a servi toute la nuit au cabaret du port, dormira très tard avant de reprendre son service pour une nouvelle soirée. A treize ans, Brigitte est une jeune fille qui ne connaît plus l’insouciance de l’enfance : elle sait ce qu’elle a à faire et l’accomplira sans hésitation, jusqu’au bout. Son regard fier étonne dans son visage poupin et rosie. La fillette revêt son passe montagne et son manteau rouges. Des mèches blondes s’échappent de sa coiffe tandis qu’elle s’entoure de son écharpe grise et enfile ses mitaines usées avant de quitter silencieusement la modeste masure où elle vit depuis 13 ans avec Marie, seules depuis que Ben est mort en mer.
Les galoches de Brigitte résonnent sur les pavés humides. A cette heure proche du crépuscule, elle croise quelques rares passants pressés qui la saluent gentiment en opinant de leurs bonnets enfoncés jusqu’aux oreilles. Brigitte aime ce moment où la lumière décline : elle puise dans cette nostalgie des paysages de la sérénité et de la sagesse.
Dans ce port qui s’ouvre sur la Mer du Nord, l’hiver a été rude. Le printemps se fait attendre. Les familles vivent petitement des produits de la pêche et meurent parfois des drames en mer quand les flots dévorent les hommes.