Archive pour le 20 février, 2009

Les malheurs de Lucien Grognasson

20 février, 2009

Lucien Grognasson est enrhumé. La tête comme un caisson, le nez qui coule, l’humeur en berne. Pour ce qui est de la mauvaise humeur, le voisinage a l’habitude, il peine à faire pire. Voici qu’il croise dans l’escalier Mademoiselle Dulampion, toujours aussi fraîche. D’un joli mouvement de tête, elle salue gaiement Monsieur Grognasson :

-          Bien le bonjour, Monsieur Grognasson, comment allez-vous aujourd’hui ?

Lucien Grognasson saisit la balle au bond. Il dit qu’il va très mal, qu’il a surement la grippe. On dit qu’elle est chinoise cette année et donc certainement mortelle.

Mais Mademoiselle Dulampion connait bien notre homme :

-          Voyons ! voyons ! Monsieur Grognasson, ce n’est sans doute qu’un gros rhume…

Monsieur Grognasson n’est pas ravi qu’on minimise son affection. Il répond qu’il avait un cousin qui croyait aussi souffrir d’un rhume et qui n’en est jamais revenu. C’était durant cette drôle de guerre.

La queue de cheval de Mademoiselle Dulampion s’agite affectueusement :

-          Je vais vous donner le remède de ma grand-mère, Monsieur Grognasson : vous coupez un oignon en deux sur votre table de nuit et il vous débarrassera de vos microbes pendant que vous dormez ! Ce n’est pas merveilleux ?

Monsieur Grognasson ne trouve pas. Il faudrait une consultation médicale et des remèdes qui aient l’air beaucoup plus sérieux qu’un oignon. Même coupé en deux.

La nuit suivante, Monsieur Grognasson essaie le truc de Mademoiselle Dulampion. On ne sait jamais, se dit-il. Le lendemain les fosses nasales de Monsieur Grognasson sont largement dégagées. Il croise de nouveau Mademosielle Dulampion à laquelle il est bien obligé d’avouer son succès thérapeutique.

Mais, du coup, Monsieur Grognasson est abattu : il n’a plus de motif à avancer pour se faire plaindre ! A tout hasard, il claudique un peu en rentrant chez lui. Mais Mademoiselle Dulampion est déjà partie de son pas souple et léger. Cette jeunesse n’a pas beaucoup d’attention pour ses aînés, tout de même !